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Franchiseur

Bien réussir son implantation en centre-commercial

Développer son enseigne en centre-commercial nécessite d’être rigoureux en tant que franchiseur pour accompagner ses franchisés dans la location d’une cellule commerciale sur l’emplacement idéal. Mais le rendement ne suffit plus. Il faut désormais convaincre les bailleurs d’adhérer à un concept novateur ou visionnaire, en phase avec les enjeux de mutation des centres commerciaux.

Tout achat d’une cellule commerciale nécessite d’un balisage complet de la future zone de chalandise. Et d’en avoir mesuré la qualité du site au préalable, que ce soit par son dynamisme, son taux de vacance commerciale, ou le prix des loyers appliqué, estime Christophe Noël, délégué général du Conseil national des centres commerciaux (CNCC). “Mais si le résultat s’avère médiocre, vous ne saurez pas si la faute revient à votre concept, ou à son lieu d’implantation car il arrive parfois qu’une offre soit inadaptée à son marché !”, précise ce dernier. Il faudra aussi déterminer en amont où le concept de l’enseigne sera le plus à même de décoller, les loyers variant d’un actif commercial à l’autre. “Soit vous allez en galerie marchande d’hypermarché, en périphérie, qui touche justement la clientèle de cet hypermarché, soit vous vous implantez dans un centre commercial de destination avec une offre complète autour des 120 à 140 boutiques. Ou bien vous décidez de vous tourner vers le retail park mais gardez en tête que le flux y sera inférieur. Néanmoins, vous aurez plus de surface de vente et paierez un loyer moins élevé”, souligne Christophe Noël. Reste à connaître l’effet locomotive qu’une enseigne recherche pour émerger, afin de poursuivre leur maillage territorial.

Anticiper la facture

De ce fait, les bailleurs attendent des franchiseurs, puis des franchisés qu’ils aient anticipé la facture (hors contexte de crise sanitaire). Et évalué leurs forces et leurs faiblesses avant la signature du contrat ; la capacité à générer du chiffre d’affaires d’une part, et maîtriser la question du rendement au mètre carré. “Si vous vendez des canapés lits qui prennent beaucoup de place alors que le rendement annuel ne dépasse pas les 1 000 ou 1 500 euros du mètre carré, vous n’irez pas dans un grand centre commercial car vous ne générerez pas assez de recettes. Pour une offre orientée prix, par exemple, je ne recommanderai pas les centres les plus plébiscités. Mais comme souvent, cela relève du bons sens chez les porteurs de projet”, explique Christophe Noël. J’incite donc les franchiseurs à faire le bilan de leur capacité locative et d’orienter leurs choix d’implantation en fonction de ces critères.” Mais pour y parvenir, une veille accrue du marché s’impose. “Il faudra être attentif au niveau des loyers et savoir identifier les régions où la croissance des revenus est forte. Cela ne vous coûtera rien d’appeler les agences pour vous informer des tendances actuelles. Faites aussi appel aux brokers qui sont experts de l’immobilier d’entreprise, qui s’avèrent de bon conseil”, ajoute Christophe Noël. En d’autres termes, il faudra anticiper la facture. Tout particulièrement dans les zones densément peuplées (Paris, Lyon, Strasbourg, etc). Mais anticiper ses frais passe aussi par une période d’évaluation de la pertinence de la concurrence et d’une mesure du taux de vacance commerciale. “Plus vous générez du flux, moins le coût du loyer se fera sentir. L’avantage concurrentiel est donc très intéressant à exploiter”, souligne Christophe Noël.

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L’art de convaincre un bailleur

Mais inutile de s’inspirer des autres car seul un concept novateur, sans pour autant être futuriste, saura imposer sa différence et décoller sur le marché. Et un franchiseur sera d’autant plus apprécié s’il est, à la fois visionnaire et à l’écoute des enjeux du propriétaire dudit centre commercial. Pour Christophe Noël plusieurs questions peuvent aider les directions de franchises à s’auto-évaluer avant d’entamer les négociations : “Est-ce que j’amène quelque chose de plus ? Du flux client supplémentaire, ou bien une offre complémentaire ? Et surtout, quel est l’attrait du bailleur pour mon concept ? En tout cas, que cela concerne la restauration ou les loisirs, par exemple, le bailleur apprécie les projets qui lui permettent de diversifier son offre.” Pour Philippe Kratz, directeur général adjoint de Comptoir de Mathilde, à la tête de 118 boutiques en France, dont 50 % implantées en centre-commercial, pas question de déléguer cette mission à ses partenaires franchisés : “Il est de notre rôle de les accompagner. D’autant que si le franchiseur est à l’initiative de la démarche, cela témoigne d’une véritable expérience en la matière. Il ne faut pas laisser les franchisés négocier seuls. Parce que pour le bailleur, l’enjeu est de trouver l’enseigne qui paiera le loyer qu’il attend. Il faut être lucide sur les attentes des uns et des autres, synthétique et ne pas avoir d’affect.”

Et alors qu’un bailleur attend des réponses rapides pour planifier ses dossiers, une négociation bien préparée, et bien entamée avantage tous les membres d’un réseau franchisé. “C’est s’assurer d’obtenir sa cellule commerciale dans de bonnes conditions financières. Et c’est d’autant plus important qu’en s’implantant en centre-ville, avec la notion du patrimoine et de la valeur du bail à la revente, le franchisé valorise son bien. Tandis qu’en centre-commercial, si le bail se termine, vous quittez les lieux, souligne Philippe Kratz. Une enseigne a donc intérêt à avoir une expérience en centre commercial pour y développer des partenaires franchisés. Et n’oubliez pas qu’il faut 9 mois pour mettre en place ce genre de dispositif, sans compter le lancement de la maîtrise d’œuvre.” Mais gare aux clichés, le bailleur n’est pas toujours le père fouettard. “Chez certains bailleurs, l’équipe est pérenne et l’on peut nouer des liens de confiance. Elle s’intéressera à notre métier et à comprendre nos indicateurs de performance et de loyer pour coconstruire une relation nationale et implanter des points de vente dans son portefeuille de bail. À l’inverse, d’autres seront tournés vers la finance et la rentabilité”, pointe le représentant de Comptoir de Mathilde. L’enseigne aura beau être présente chez Carmila, Mercyalis, Casino ou Jumbo, elle se réserve aussi le droit, comme tout autre type de commerce, de renégocier ses conditions. Les franchises ont ainsi l’avantage de choisir avec qui elles souhaitent travailler (ou pas). “On ne sera pas là à n’importe quelles conditions ou taux d’effort. Avant, nous acceptions des choses pour fréquenter des sites pertinents mais le Covid a remis les cartes sur table. La notion d’échange est donc très importante”, poursuit Philippe Kratz. Aussi, depuis la crise sanitaire et au regard des fermetures imposées par le gouvernement et la récurrence des abandons de loyers, les relations se seront apaisées entre bailleurs et locataires. “Beaucoup d’accords ont été trouvés entre enseignes et propriétaires, parfois pour partager les charges. Et les discussions sont plus ouvertes entre bailleurs et locataires”, constate le CNCC.

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Les foncières recrutent elles-mêmes des franchises

Par ailleurs, les nouvelles propositions et le mode de fonctionnement des foncières semblent rassurer les franchises. Celles-ci sont d’ailleurs de plus en plus nombreuses à signer des baux commerciaux. “Nous constatons une évolution nette de signature des baux en franchise. Il y a 4 ans on en signait 15 %, aujourd’hui cela peut monter à 40 %”, témoigne Eric Robert, directeur commercial Carmila France. Et sa foncière a d’ailleurs créé un axe spécialement dédié à la franchise. Non pas en réponse à la crise sanitaire, mais à la demande du marché, il y a déjà 5 ans de cela. “L’axe franchise se développe depuis 5 ans avec des bureaux Carmila France à Toulouse, Lille, Rennes, Lyon et Boulogne-Billancourt, justement pour garder cet ADN commerçant et être proche de nos franchisés”, poursuit Eric Robert. Et si les franchisés et franchiseurs s’intéressent aux centres commerciaux, les foncières en recrutent d’elles-mêmes de leur propre initiative. Et leurs conditions et leurs arguments ne manquent pas. Aide au choix du local, relations humaines, tout est fait pour les convaincre et les aider à s’installer sereinement. D’autant plus qu’un contrat avec Carmila France s’étend sur 10 ans. “Nous leur proposons entre autres, une aide en matière de recrutement au travers de datings dans nos centres, et nous leur proposons également un renfort de communication lors de leurs temps forts commerciaux”, ajoute le directeur commercial de Carmila France, travaillant aujourd’hui avec 3 500 locataires, dont des franchisés.

La mutation des centres commerciaux a commencé

L’enjeu de convaincre, du côté des deux parties prenantes, est d’autant plus important à l’heure de la mutation des centres commerciaux. Des complexes qui souhaitent accroître le temps de visite sur site. Et si tous les espaces ne bénéficient pas de rénovations ou d’extensions colossales, à l’image du niçois Cap 3000 inspiré des malls américains, ou de restructurations comme Le Polygone à Montpellier, la filière diversifie largement son offre. Autre exemple titanesque à Paris, avec la restructuration des Halles (53 millions de visiteurs annuels) qui viennent d’inaugurer une nouvelle offre food et mode pour compléter l’installation de la Canopée en 2016.“La question maintenant, c’est comment diversifier l’offre du bailleur. La promesse est la même pour tous : performer en termes d’expérience client”, analyse Christophe Noël. Et ce dernier d’observer un boom des offres de sport et de bien-être. “J’ai été surpris, de constater, à deux reprises, des projets d’implantation de concept fitness au sein de villages outlet. Et de constater leur intérêt grandissant pour la question de la récurrence de visite des consommateurs.” Selon lui d’ailleurs, ces secteurs d’activité sont porteurs. “Prenons l’exemple du centre de santé. Pourquoi ne pas l’implanter en centre commercial ? Ou réserver des mètres carrés en plus dédiés au bien-être ? Enfin, les gérants de salles de fitness ne pourraient-ils pas conserver leur clientèle historique tout en élargissant leurs prestations au seniors ? Cela permettrait d’avoir des offres hybrides et complémentaires ! Aujourd’hui, les bailleurs cherchent à faire venir les séniors. Si vous allez dans ce sens, cela peut les inciter à trouver des opportunités aux enseignes”, développe Christophe Noël.

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L’appel du large

Enfin, évitez les zones saturées ou qui perdent des habitants. “Mieux vaut être à Mandelieu, Bordeaux ou Nantes en termes de socio-démographie et d’impact, que dans des villes qui perdent des habitants”, estime ainsi Christophe Noël. Autrement, optez pour la province, comme Philippe Kratz chez Comptoir de Mathilde : “Nous ciblons Brétigny, Montesson, Ormesson-sur-Marne, les centres commerciaux du Nord, et Grenoble pour y développer la notoriété de la marque. Evidemment, les magasins ont un tronc commun mais le plus important, c’est d’adapter les spécificités du modèle aux différents parcours clients. Nous maillons aussi des villes ou nous sommes déjà présents, mais pas sur les mêmes types d’implantation, par exemple.” À noter aussi que la façade atlantique est dynamique. “Elle bénéficie d’un boom durable, de Biarritz jusqu’à la côte bretonne. Les grandes agglomérations connaissent toujours un taux de croissance de leur population et de revenus très nettement supérieurs à la moyenne française. Peut-être à cause du Covid et du changement des modes de consommation”, indique Christophe Noël. Et ce dernier de conclure : “Une fois de plus il faut bien observer le tissu économique et voir qui sont les concurrents sur la zone. Et savoir si, par exemple, votre activité sera intemporelle ou saisonnière.” Ultime recommandation : réadapter son offre en centre commercial. “Pour nous il y a eu une évolution du concept mobilier et merchandising. Et un turnover plus régulier des produits, avec des séries et des stocks limités pour non seulement éviter le gaspillage, mais surtout créer le buzz sur certaines références”, témoigne Philippe Kratz chez Comptoir de Mathilde, qui ambitionne les 130 unités d’ici fin 2022.

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