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Caisses automatiques : la rentabilité assurée pendant les jours fériés ?

Comme le 25 décembre, 118 hypermarchés et supermarchés du groupe Casino seront ouverts le 1er janvier, grâce à des caisses en libre-service. Selon le distributeur, ce système a déjà été testé fin 2018 à Lyon, et permet à 150 magasins d’ouvrir tous les dimanches. Objectif : répondre aux besoins des consommateurs. Ces caisses automatiques sont-elles l’avenir de la grande distribution ? Doit-on craindre la disparition des caissières, comme le redoutent les syndicats ? L’analyse de Frank Rosenthal, expert en marketing du commerce.

 

Quel est l’intérêt pour la grande distribution d’ouvrir ses portes en mode “automatique” en dehors des jours ouvrables ?

L’extension des heures d’ouvertures (le soir, le week-end, et maintenant les jours fériés) est une tendance forte, surtout dans les zones urbaines. Il s’agit d’une réponse au e-commerce, qui fonctionne 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, mais aussi d’une façon pour les distributeurs d’offrir un nouveau service à leurs clients. C’est ainsi un bon moyen pour une enseigne de se démarquer de la concurrence en permettant aux consommateurs de se rendre en magasin dans le cadre de “courses de dépannage”.

Ainsi, le distributeur peut “faire du chiffre” pendant que les autres sont fermés : comme ce fut le cas le 25 décembre, le groupe Casino espère accueillir entre 500 et 700 clients en moyenne par magasin le 1er janvier. Même si c’est loin des 2 000 à 3 000 personnes comptabilisées un jour ouvrable ordinaire en semaine, il s’agit tout de même de consommateurs ”pris” à des concurrents qui restent fermés.

Reste toutefois à prouver que ce modèle est rentable pour les commerces de détail alimentaire. En effet, les clients ne peuvent effectuer que des achats limités via des caisses automatiques. Avec ce système, le magasin est ouvert, mais en mode dégradé, car la loi actuelle interdit aux commerces alimentaires de faire travailler ses salariés les jours fériés. Les clients peuvent penser que Casino, par exemple, cherche à faire des économies en évitant d’employer des caissiers humains, mais en fait, ils n’a pas le choix.

Sans personnel d’animation commerciale, les stands de découpe du poisson, de viande et de fromage, qui animent le magasin et le font vivre, sont fermés. Sans caissiers, les clients doivent se débrouiller tous seuls. Or, ils sont nombreux à avoir besoin d’explications pour utiliser les machines. Ce n’est clairement pas un hasard si l’été dernier, un hypermarché Géant, ouvert le week-end, mais sans hôtesses de caisse, a été brocardé pour avoir laissé des vigiles aider des clients.

Pour les commerces de la grande distribution, le dilemme demeure donc : soit ils ferment leur magasin et encourent le risque de voir leurs clients passer au e-commerce, soit ils ouvrent, mais dans des conditions dégradées. Car tant bien même le personnel serait volontaire pour travailler, il n’a pas le droit de le faire. Il faut donc embaucher des vigiles pour sécuriser les clients et les produits, et compter sur la débrouille des consommateurs.

 

Le groupe Casino souhaite aussi répondre aux besoins des consommateurs. Ont-ils vraiment besoin de magasins automatiques les jours fériés ?

Les clients sont libres, ils ne sont pas obligés de venir faire leurs courses le dimanche ou les jours fériés dans un magasin ouvert en mode dégradé. Mais pour le consommateur, cela peut être très utile et lui rendre service, notamment quand il rentre de vacances et souhaite remplir son frigo, comme c’est le cas en cette période de fêtes.

Le succès des supermarchés automatiques ouverts le dimanche et les jours fériés dépendra de ce que feront les clients. Leur comportement pèsera sur la rentabilité de ce modèle. Si l’expérience de Casino s’avère concluante, elle pourrait facilement entraîner d’autres distributeurs sur cette lancée. Au contraire, en cas d’échec par manque de rentabilité, la grande distribution risque d’abandonner ce système.

Mais si la loi était assouplie et permettait au personnel qui le souhaite de venir travailler les jours fériés, comme c’est le cas le dimanche, le principal frein à ce système disparaîtrait et la question ne se poserait même plus.

 

Les caisses automatiques sont-elles l’avenir de la grande distribution ?

Le comportement du client n’est pas neutre. Aujourd’hui, selon les études sur le mode d’encaissement, le client veut de tout. Il veut des caisses automatiques et des caisses traditionnelles. Il veut avoir le choix et réduire au maximum l’attente. Pour des petites courses, la caisse automatique est plus rapide mais si vous avez un chariot rempli, la caissière, qui a l’habitude de manipuler les produits, ira plus vite.

Le lien social reste en outre primordial : nombre de clients viennent aussi pour discuter avec les caissiers. L’intérêt du distributeur est aussi que le lien social pèse sur la préférence du client pour tel ou tel magasin. Si la tendance devrait être à l’automatisation des processus, les caissiers humains ne disparaîtront donc probablement pas. Une généralisation de l’automatisation est donc peu probable : les magasins du futur devraient probablement proposer un modèle hybride, avec et sans caissières (1).

On peut aussi imaginer à terme qu’il y aura des paiements par mobile, suivant le modèle des boutiques Amazon Go aux États-Unis : dans ces commerces, le consommateur n’a même pas besoin de scanner les produits qu’il achète, grâce à des caméras et des capteurs qui lui permettent de payer sans passer en caisse, tandis que des conseillers humains sont là pour l’encadrer et l’accompagner.

 

(1) Selon une étude du groupe Nielsen publiée en juillet dernier, 57 % des supermarchés et hypermarchés de France proposent à la fois des caisses traditionnelles et des caisses automatiques, soit 1 887 sur 3 299.

 

 

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